Le transport : un secteur en tension et qui embauche

Le transport, un secteur en tension qui embauche

S’il est un secteur en tension et qui embauche massivement, c’est bien celui des transports. Il recherche constamment de nouveaux profils, de l’intérim au CDI en passant par l’apprentissage. Au total, plus de 120 000 postes sont à pourvoir cette année.

Avec près de deux millions de travailleurs (secteurs public et privé confondus), selon Pôle emploi, les métiers des transports et de la logistique comptent parmi les principaux pourvoyeurs d’emploi en France. Une tendance confirmée depuis les premiers la pandémie, qui ont placé le secteur sous tension constante de recherche de main d’oeuvre.

En 2021, les organisations professionnelles estimaient ainsi à 50 OOO le nombre de postes non pourvus dans le seul transport routier. En 2022, selon l’enquête de besoins en main d’oeuvre (BMO) publiée par Pôle emploi, le transport et la logistique représentent quelque 125 350 projets de recrutements (contre 96 060 l’an dernier), dont une majorité de conducteurs routiers (32540), ouvriers manutentionnaires (16 660), conducteurs de transports en commun (16 060) et livreurs sur courte distance (15 060). Le secteur tourne à plein régime et manque de personnel pour accompagner la demande croissante et renouveler ses effectifs vieillissants, au sein de professions qui peinent souvent à attirer lesde plus jeunes.

« Avant la pandémie, le secteur très attractive. Mais depuis la crise sanitaire, on observe des demandes et des besoins en recrutements exponentiels de nos clients, «  analyse Cécile Voyant, manager et support réseau spécialisée transport chez Randstad France, spécialiste de l’intérim et des ressources humaines. Et pour cause : au gré des bouleversements de la consommation et de la vie des ménages, les transports sont toujours plus sollicités par le développement, par exemple, de l’e-commerce, du click & collect, du drive…

DAMIEN BACHELARD, 21 ANS,
CONDUCTEUR POIDS LOURD DANS L’AGRO-ALIMENTAIRE


« Après mon bac, je me suis lancé dans des études de rogrammation informatique mais cela ne m’a pas du tout plu. Je me suis ensuite inscrit auprès d’une agence d’intérim du groupe Randstad en précisant vouloir devenir chauffeur routier. Après avoir travaillé neuf mois comme opérateur de ligne, Randstad m’a proposé une formation pour devenir conducteur poids lourd. J’ai donc passé mon titre professionnel de conducteur routier d’octobre 2021 à janvier dernier. J’ai obtenu mon permis C ainsi que l’ADR, qui permet de transporter des matières dangereuses, et la formation initiale minimum obligatoire, ou FIMO, qui permet de transporter des marchandises pour le compte d’autrui. Les trois sont obligatoires pour devenir chauffeur routier. Tout cela a été financé par Randstad dans le cadre d’un CDI intérimaire au sein du groupe. Dès la fin de ma formation, l’agence m’a trouvé un poste dans une entreprise et je conduis aujourd’hui un camion porteur de dix mètres et demi de long. Le CDI intermédiaire m’a très bien convenu, il y a un excellent suivi et j’ai pu apprendre un métier utile pour la société qui, en plus, me plaît car j’adore conduire. Maintenant, je me lève en étant heureux d’aller travailler. « 

SYLVIE LAMY, 46 ANS,
CONDUCTRICE DANS LE TRANSPORT ROUTIIER DE MARCHANDISES


“Devenir chauffeur poids lourd a toujours été mon rêve. Je n’ai pas pu l’accomplir à seize ans, quand mon père m’a orientée vers la boulangerie où j’ai travaillé jusqu’à trente ans. Après un arrêt de travail de cinq ans, imposé par des problèmes de santé, j’ai saisi une opportunité proposée par Pôle emploi pour me diriger vers le secteur des transports.
J’ai donc commencé, en juin 2021, ma formation en titre professionnel à l’association pour la formation professionnelle
des adultes, ou AFPA, pour passer le permis CE 44 tonnes et plus, que j’ai obtenu début mai. Malgré mon âge, j’ai pu faire cette reconversion naturellement et enfin découvrir un métier fait pour moi. Je conseillerais à tout le monde l’immersion en entreprise pour commencer et se confronter aux réalités.
J’ai été très bien accueillie malgré quelques a priori sur ma
capacité à mener à bien tout ce que les hommes font. Mais
j’ai rapidement trouvé ma place et ma voie.”

Autant dire que les opportunités d’emploi ne manquent pas. Et le secteur offre une multitude de domaines et d’activités. Les besoins restent toutefois particulièrement concentrés sur les postes de chauffeurs routiers, comme le confirme Nicolas Gendry, responsable d’une agence de recrutement et d’intérim Connectt, spécialisée transport et logistique : « nous sommes en recherche permanente de chauffeurs. Parrapport à la demande de nos clients, nous sommes en manque de 30 à 40 conducteurs par semaine. En particulier desjeunes, car la moyenne d’âge actuelle est d’environ 45 ans. « 

UN MANQUE DE CANDIDATURES

Si les pénuries de main d’oeuvre touchent l’ensemble des grands acteurs du paysage, elles menacent également le bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement et des transports en commun.

Un exemple : Keolis, qui emploie près de 70 000 personnes et exploite des réseaux de transports publics dans toute la France.  « Nous faisons face à une pénurie globale, sur tous les postes, nous le ressentons à tous les niveaux, confirme Constance  Bussereau, responsable de projets RH pour le groupe.

Dans certaines zones, nous ne pouvons  pas répondre aux besoins et nous devons parfois réduire l’offre de transport, «  Même constat pour Cécile Voyant : « quand nous observons nos diffusions d’annonces, nous sommes à +10 % ou +15 % selon les métiers parce que nous avons énormément de demandes mais trop peu de candidats. « 

Pour répondre à ces enjeux cruciaux, la conquête d’un nouveau public est primordiale. De même qu’une refonte de la réputation d’un secteur fréquemment mal perçu. « Il y a probablement un déficit d’image, souvent immérité mais qui constitue l’un de nos grands enjeux pour attirer les jeunes, «  avance Constance Bussereau.

Pourtant, le transport peut être un métier passion. A l’instar de Damien Bachelard, conducteur de poids lourds dans l’agroalimentaire : « plus jeune, je me suis rendu compte que j’aimais conduire et passer du temps sur la route. »

C’est pour susciter ce genre de vocation que les entreprises du secteur misent notamment sur la formation. « Nous avons besoin de créer de la compétence pour répondre aux besoins de nos clients. Chez Randstad, nous formons des chauffeurs et nous les accompagnons dans la montée en compétences,  » explique Cécile Voyant.

DES PERSPECTIVES DE CARRIÈRE

Grâce à des parcours de formation rémunérée, souvent en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation, le secteur offre ainsi une insertion guidée et clé en main.

« Nous recrutons de plus en plus de person nes peu qualifiées que nous formons dès le début, confirme Constance Bussereau de Keolis. Par le passé, quand nous cherchions des conducteurs de bus, ils arrivaient avec leur permis D, pour le transport de personnes. C’est un temps révolu. Aujourd’hui, nous attendons avant tout de la motivation et du savoir-être. « 

Une démarche également cultivée par l’agence Connectt, témoigne Nicolas Gendry: « par exemple, pour qu’il puisse progresser, nous faisons passer à un chauffeur qui a un permis C, pour le transport de marchandises et de matériel, un permis EC, pour les véhicules de catégorie C attelés d’une remorque. »

De quoi présager des possibilités d’évolution intéressantes pour les nouveaux venus, insiste Cécile Voyant : « il faut parler des perspectives de carrière qu’offre le secteur. Et dire auxpotentielles recrues qu’un métier de conducteur ou de chauffeur livreur peut être le début d’une belle carrière, jusqu’à même devenir formateur ou avoir sa propre entreprise. « 

Autre formule qui séduit de plus en plus de travailleurs : le CDI intérimaire, qui booste l’attractivité du secteur. Dans des métiers qui se pratiquent souvent en temps partiel ou à coup de missions de court ou de long ternies, l’intérim s’impose comme une voie d’insertion de choix. Concrètement, comme pour un contrat temporaire classique, un CDI intérimaire se traduit par la mise à disposition d’un salarié temporaire auprès d’une entreprise. Il est alors embauché et rémunéré par une société de travail temporaire (ETT), le plus souvent des agences d’intérim, qui l’envoie en mission auprès de ses clients. Une façon de multiplier les expériences et de servir de tremplin pour une insertion professionnelle rapide.

TROUVER DU SENS

L’un des grands enjeux des entreprises des transports et de la logistique, c’est de séduire de nouvelles générations souvent en quête de sens.

Pour dépoussiérer l’image d’un secteur vieillissant, l’innovation et l’utilité sociale sont mises en avant. « Il s’agit de miser sur la transition écologique, avec des véhicules plus propres, de l’écoconduite ou une politique de livraison du dernier kilomètre avec des véhicules légers ou électriques, » résume Cécile Voyant de Randstad France. Une façon de continuer à capter les passionnés de mécanique tout en attirant un nouveau public. Chez Keolis, l’accent est également mis sur ces critères d’exigence, comme le détaille Constance Bussereau: « le message que nous adressons à nos candidats et aux jeunes, c’est que notre métier a du sens. Conduire les personnes dans les transports en commun, c’est à la fois participer à la  vie de la collectivité et contribuer à la réduction de l’usage de la voiture individuelle et des carburants polluants.  » Autre grande révolution, la féminisation du secteur, érigée au rang de priorité. Et pour cause, elle représente potentiellement un vivier considérable de nouveaux talents.

Le transport routier ne compte actuellement que 5 % de conductrices et la part de femmes dans l’ensemble du secteur transport et entreposage se limite à environ 20 %.  

Entre stéréotypes tenaces et habitudes, l’arrivée des femmes dans ces métiers n’est pas toujours  une évidence, mais s’impose comme une solution d’avenir.

Les chiffres montrent pourtant qu’elles s’insèrent mieux sur le marché du travail : 82 % de celles qui sortent de formation sont en emploi six mois après leur apprentissage en transport-logistique, contre 76 % pour les hommes.

Constance Bussereau renchérit : « nous avons un taux deféminisation encore insuffisant, c’est un gros enjeu pour Keolis. Cela représen te un réservoir de candidatures auxquelles nous ù’avons longtemps pas eu accès. Ilfaut dépasser les a priori. ”

Une ligne de conduite à adopter de toute urgence !

Par : Adam Belghiti Alaoui

Source : Journal REBONDIR

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